Vous avez certainement lu cet article paru sur le blog de la « Menace-théoriste » qui dénonce les personnes qui seraient à la limite de la légalité en se qualifiant de psychopraticien, utilisant des méthodes qui seraient non-éprouvées. Il est notamment question d’une praticienne EFT dans cet article.
Par le schéma ci-dessous je voudrais montrer que la perception de la limite entre le normal-existentiel et le pathologique-médical dépend deux choses qui ne sont pas directement lié à la chose en elle-même. Puisque c’est essentiellement des faux-psys dont il s’agit et de l’EFT je vais poser une distinction entre le normal et le pathologique dans le cadre de la pratique de l’EFT. Comme vous le savez l’EFT cible et désensibilise essentiellement l’émotion qui s’exprime en rapport à une situation, ceci permettant à terme d’obtenir un ajustement de la cognition en rapport à celle-ci également.
L’émotion humaine n’est pas quelque chose de « pathologique », c’est une fonction naturelle de l’esprit humain en rapport à l’existence. Ce qu’il est possible de considéré comme « pathologique » c’est tous les désordres qu’une gestion inappropriée de l’émotion peut causer dans notre corps, sur notre comportement et notre manière de percevoir les choses. L’émotion est le produit normal d’un certain ordre existentiel, alors que le pathologique est le désordre produit par une mauvaise gestion de l’émotion.
La psychothérapie serait le fait de prendre plus particulièrement en charge ce désordre, notamment lorsque la personne est trop enlisée dans les conséquences de la gestion inappropriée de ses émotions naturelles. Il y a tout un langage, un champ lexical, qui est utilisé pour décrire ces désordres que l’on nomment "troubles mentaux ou comportementaux". Or l’EFT tend plutôt à prendre directement en charge l’émotion humaine dans sa dimension existentielle, socio-relationnelle, en amont, courcircuitant quelque part le désordre causé en aval par sa mauvaise gestion. Si on s’en tient à cette distinction entre le normal et le pathologique, et donc à une pratique qui ne cherche que l’émotion qui a été ressentie dans certaines situations pour en obtenir la résolution (métabolisation) alors cette pratique ne relève pas vraiment de la psychothérapie puisque le désordre n’est pas expréssement l’objet ciblé par la pratique. Naturellement si une émotion est à l’origine d’un désordre sa résolution va de fait le résorber. Ceci donne un statut ambivalent à la pratique de l’EFT dans le cadre de cette distinction car d’une part l’émotion est normale mais ce qu’elle peut engendrer comme désordre ne l’est plus.
Il faut à présent considérer les deux aspects majeures qui influencent cette limite entre normalité et pathologie, et par voie de conséquence la manière dont cela altère notre perception de l’EFT. La première est le champ lexical utilisé et son déplacement. De nos jours le champ lexical médical a largement investit le domaine existentiel et social. Ainsi ont décrit l’expression d’états et de comportements prenant racines dans des conditions existentielles ou sociologiques comme étant de nature pathologique : - c’est la « médicalisation de l’existence ». Ce déplacement du champ lexical implique que nous allons tendre à utiliser malgré nous un langage médical dans la pratique de l’EFT et donc à médicaliser notre pratique de l’EFT sans le vouloir. Nous allons alors prétendre implicitement pouvoir régler des problèmes formulées en termes médicaux ou de troubles mentaux mais qui n’en sont pas forcément ou qui le sont devenus uniquement par la description que la société s’en fait médiatiquement. Naturellement, en élargissant ce type de discours à des conditions existentielles cela définit de nouvelles choses à prendre en charge par des professionnels de la santé.
Sous cet angle, un praticien EFT marche clairement sur les plates bandes de la psychothérapie institutionnelle. Mais on peut se demander si la psychologie clinique et la psychothérapie n’a pas elle-même interprété abusivement des conditions existentielles normales et leurs conséquences comme des "pathologies". Et cela en vertu des mêmes deux facteurs : - le champ lexical qui décrit ce qui est observé en terme de pathologie, de maladie, d’anomalie mais aussi de l’incapacité à modifier l’état mental et comportemental décrit comme tel, nécessitant alors une prise en charge de soutient, d’écoute et d’intervention par un professionnel de la santé. Or, une chose qu’apporte une technique révolutionnaire comme l’EFT est un pouvoir réel et directe sur notre émotivité. Ce que nous ne possédions pas vraiment auparavant. Ainsi tous les subterfuges et les façons que nous avions de nous adapter à ce que nous ressentions, et qui est décrit comme des désordres psychologiques (alcoolisme, boulimie, etc..) deviennent des stratégies de gestion des émotions inutiles à partir du moment où nous résolvons les émotions elles-mêmes qui en sont l’origine. Autrement dit, le pathologique lui-même recul et perd du terrain. Une partie de celui-ci peut désormais être prise en charge par soi-même ou des personnes qui ne sont pas des professionnels de la santé. C’est ce que fait un praticien EFT qui peut obtenir des résultats sans avoir suivit pour autant des années de formations en psychologie clinique.
Ainsi le praticien EFT est piégé entre deux phénomènes qui évoluent dans le sens contraire et qui vont le contraindre à faire de sa pratique une psychothérapie qui ne peut pas dire son nom sous peine de tomber sous le coup de la loi. D’une part, le champ lexical médicale qui désormais évolue et s’étend dans le domaine existentiel normal, et d’autre part une immersion dans ce qui était habituellement considéré comme pathologique par manque de pouvoir et d’autonomie dessus.
Le praticien EFT est un pseudo-psychothérapeute malgré lui : - il résout des émotions de nature existentielles, entraînant la disparition de leurs conséquences décrites comme des troubles mentaux ou des pathologies, qui ont résistés jusqu’à ce jour à cause de méthodes inappropriées. Naturellement, il y a des degrés d’enlisement et d’enfoncement dans les désordres causés par une gestion inadaptée des émotions qui rend souvent la prise en charge par une aide extérieur nécessaire. Lorsque l’on est trop perdu en soi-même à cause de nos multiples adaptations, l’aide d’un professionnel s’avère nécessaire. Mais au final la réussite viendra toujours la résolution des émotions à la source de nos més-adaptations.
Youri Badel, 2021
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